Je ne suis pas de ceux qui critiquent tout azimut notre système de santé.
J'ai surtout la chance d'avoir un médecin de famille qui a su démontrer son savoir-faire et son empathie au fil des ans. Notre petite ville est choyée et l'hôpital régional à une dizaine de km assure de bons services dans un climat la plupart du temps plus que décent!
Dans ma région élargie, tout le monde n'a pas cette chance.
Je vous ai parlé le 14 juin dernier de ma tante d'adoption D. qui combat un cancer du pancréas.
D'interventions en médications en prises de sang multiples, D. combat toujours, plus amaigrie, réaliste et décidée d'aller jusqu'au bout.
Aujourd'hui donc, rencontre avec une infirmière de son CLSC. Une rencontre de trois (3) heures dont elle m'a retracé brièvement les grandes lignes, je devrais dire "les lignes qui font mal".
Voici en gros les interventions de cette intervenante dépourvue d'empathie et d'écoute à une patiente qui entreprendra sa chimiothérapie dans trois (3) jours:
"Vous savez que vous allez mourir!"
"Est-ce que vos papiers et vos affaires sont à l'ordre?"
"Lorsque viendra le temps, il y a une excellente maison de soins palliatifs à B....!"
"Est-ce que vous êtes croyante, religieuse?" ....et j'en passe!
D. est une femme de 82 ans, chaleureuse, forte, responsable et ...hypersensible! Elle m'a raconté avoir beaucoup pleuré. Puis s'être fâchée (par en-dedans bien sûr, les gens de sa génération ne font pas de crise!). "De quoi elle se mêle, je commence une chimio, c'est tout ce que je veux savoir!" Ont suivi les conseils d'usage préalables à la chimio, conseils lourdement prodigués sans même se soucier de ce que D. pouvait questionner.
À son retour, D. m'a dit: "Tu le sais toi, je cuisine tout ce que je mange, les légumes à la marguerite, je bois 2 litres d'eau par jour, je surveille le gras et le sucre. J'aurais pu lui faire remarquer qu'elle ne devait pas en faire autant vu son obésité, mais je ne suis pas assez méchante. Elle a aussi dit que je ne devais plus boire d'eau de source mais de l'eau en bouteille! Avant de partir, je lui ai dit que j'allais boire un bon scotch ce soir et qu'elle ne s'inquiète pas, je n'en boirais pas la veille du traitement!"
Et cette personne unique qu'est D. a aussi calmement ajouté: "Je le sais que je vais mourir dans pas grand temps, mais je ne veux plus en entendre parler. Je fais les traitements, je fais ce que j'ai à faire et pour le reste, on verra!"
Je répète donc à M. le ministre Bolduc qu'il y a des coups de pied au cul qui se perdent?
Nous vivons dans une bizarre de société.
On refuse à ceux qui le voudraient de les aider à mourir.
On traite comme des gens à l'agonie ceux qui sont malades et prêts à combattre.
Et si d'aventure, vous parlez de la mort comme d'une chose naturelle, qui va main dans la main avec la vie, on vous qualifie de "morbide" (expérience personnelle).
Moi aussi tiens, je vais prendre un scotch et des glaçons!
8 commentaires:
Bonjour Marico,
Incroyable! Il faut déjà être passé par les hôpitaux ou C.H.S.L.D. pour comprendre le manque d'empathie que la plupart du personnel démontre.
Maman est décédé dans un C.H.S.L.D. et le personnel nous ignorait complètement... pendant les trois jours d'agonie. Pourtant, elle était à cet endroit depuis onze ans et il nous connaissait.
Bonjour Grimimi. Merci de ton commentaire. Maman aussi est décédée dans un C.H.S.L.D. Par contre, le personnel soignant a été généralement extraordinaire; ils ont même protesté auprès de la direction qui insistait pour que nous vidions sa chambre dès le lendemain de son décès. Une des soignantes leur a dit: "Pour une fois, qu'une famille s'occupe vraiment de son parent, laissez-leur au moins le temps de s'organiser!" Ce qui nous a valu 2 jours de sursis.
Je comprends qu'il y ait des lignes directives; ce que je ne comprends pas, c'est l'obéissance à ses règles, sans aucune empathie!
C'est terrible, ce que doit vivre ta tante et ceux qui l'aiment. Son espérance de vie n'est pas très grande, non pas à cause de son âge mais parce que le pancréas, c'est vital, qu'il y a probablement des métastases. De loin, sans connaître son état de santé précis, il me semble que les traitements de chimio vont servir à améliorer son état de santé dans l'immédiat, sans espoir d'une rémission ou d'une guérison...
Non pas que je veuille me faire l'avocate du diable mais... Il n'y a pas, je crois, de bonne manière d'aborder cette question avec un(e) patient(e). Il pourrait y en avoir des moins pires par exemple et je te l'accorde, tous les intervenants n'ont pas les mêmes dispositions naturelles.
Si je te dis ça, c'est que mon père, dans sa dernière année de vie, s'est mis à détester une infirmière dévouée, douce, professionnelle qui voulait l'aider à aborder le sujet de sa mort prochaine alors que lui était resté bloqué à l'étape du déni. Ça a été l'enfer à vivre pour tout le monde autour de lui... et pour lui. Je n'oublierai jamais cette infirmière, Caroline, qui voulait bien faire, même au-delà des tâches qui lui étaient dévolues.
Par contre, si tu veux donner des coups de pied là où le dos perd son nom au ministre de la Santé, Yves Bolduc, moi, je me ferais un plaisir de le tenir en place pendant que tu t'exécutes!!! Ça me permettrait de lui passer en direct deux ou trois messages importants...
Je comprends ton indignation...Je sais que le travail des soignants n'est pas facile ..mais quand même comment peut-on avoir aussi peu de délicatesse, d'empathie?
Merci Gazou.
Ma soeur, infirmière de carrière, me dit avoir côtoyer des soignants (une minorité heureusement), totalement dépourvus d'empathie face à leurs patients et à leurs collègues! Elle inclus aussi certains médecins!
Surveillons nos proches lorsqu'ils sont malades! Assistance et amour.
J'ai fait longtemps du bénévolat auprès des personnes agées et ce n'est pas tout le monde qui a de la délicatesse.Il me semble que ça devrait faire l'objet d'un cours spécial dans la formation.
Comme je semble vous croiser un peu partout, j'ai décidé de venir vous rendre visite Marico et je suis tombée sous le charme de votre plume et de vos superbes photos.
Merci d'illuminer la blogosphère avec des sujets aussi passionnants que ceux dont vous traitez.
En passant, ce dernier billet me va droit au coeur, ayant vécu des histoires épouvantables avec le personnel de la Résidence ou ma pauvre maman a passé les quatre dernières années de sa vie. Ce que je pourrais raconter ferait frémir d'horreur les plus coriaces, mais je ne trouve pas encore les mots qu'il faut.
Merci Marico de ne pas craindre votre plume et je vous accompagne en sirotant une vodka avec des glaçons! ;)
Un coup de pied au cul, des fois, ça fait du bien, ça ne guérit probablement pas, mais ça fait du bien, ça c'est certain.
Bien du courage à ta tante, le chimio, c'est parfois ardue.
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