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Nous avons finalement visité les jardins de Cap à l’Aigle. Une collection de lilas ahurissante et un design horticole fort intéressant. Faut dire que la géographie du lieu, hauts coteaux et falaise en bordure du fleuve, s’y prête bien. Un ruisseau sous les arbres traverse les plans en étage du jardin et descend en chutes et cascades vers le fleuve. Absolument superbe, j’ajouterais même émouvant. La beauté du fleuve et la diversité des végétaux me comblent.
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En route vers Forestville
À peine quelques dizaines de kilomètres après Tadoussac, la végétation change. Les arbres sont plus chétifs, les plantes battues par le vent du large, moins luxuriantes que dans Charlevoix. Mais pas moins belles, loin de là! Il y a quelque chose de touchant dans cette façon qu’ont les arbres de s’accrocher aux terres qui longent le fleuve. Et les battures et les oiseaux de mer et la marée... Je réalise combien tout cela m'a manqué!
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La deuxième et dernière journée, déjà! Un avant-midi frigorifiant en profondeur : un brouillard arrivait de la mer par moment, accompagné d’un vent froid. Malgré les manches longues et les coupe-vent, nous étions frigorifiés. JL a pêché sur la fosse no 2 avec bonheur mais sans succès. Pas grave. Cette fosse est le meilleur endroit pour admirer la montaison du saumon. Les premières loges vraiment. Le saumon, roi des poissons, je sais pourquoi. Sa force et son élégance dans sa remontée à contre-courant sont impressionnantes. C'est le poisson déterminé par excellence. J’ai souhaité bonne montaison et la vie sauve à chacun de ceux qui se sont envoyés en l’air parmi les embruns des chutes.
Dans l’après-midi, nouvelle fosse, nouvelle expérience. Une fosse à l’écart cette fois-ci, qui permet de pratiquer nos lancers. Les conseils de JL m’ont permis d’améliorer grandement la portée et l’élégance de mon geste. J’adore voir la ligne s’envoler avec grâce, se poser sur l’eau et glisser avec le courant.
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Ile d'Orléans
Nous sommes à l’auberge Le Canard Huppé de l’Ile d’Orléans, un endroit approprié pour fêter la St-Jean.
Nos ancêtres ont connu ce coin de pays il y a bien longtemps et je pense à eux qui avaient intrépidement traversé « la grande eau » pour se refaire une vie au nouveau monde, avec le courage de ceux qui n’ont plus rien à perdre. Nous avons hérité d’eux un pays neuf, riche pour qui veut et peut travailler fort, un pays vaste à la nature aussi belle que généreuse.
Un peu amoché ces temps-ci notre beau pays par la sombre bande qui mène à Ottawa et par le manque de vision qui prévaut à Québec. Ce voyage à l’Ile d’Orléans ramène aussi le souvenir du grand Félix Leclerc qui nous manque plus que jamais en cette période triste et terne de notre histoire. Qu’est-ce qu’il en penserait Félix de la tiédeur et de la facilité ambiante, de nos politiciens à la langue fourchue, du manque d’enthousiasme et de passion généralisé. Esprit de Félix, s’il-te-plaît, viens nous secouer tous, nous brasser, nous rappeler d’où nous venons pour que germe dans nos cœurs fatigués le goût des destinations inspirantes. Je sais bien qu’à mon âge, il faut se ranger du côté de la jeunesse, mais cette pauvre jeunesse elle-même se désespère au lieu de se révolter, de se manifester, d’y aller des grands élans propres justement à son âge qui devrait être de feu.
Sous le couvert de l’universalité, on relègue la fierté nationale au grenier, comme s’il était impossible de conjuguer les deux, ouverture sur le monde et identité nationale.
Et c'est ainsi que se termine ce court carnet de voyage.
J'ai retrouvé mon jardin intact, à part les fraises mûres picorées par les oiseaux. Les iris versicolores splendidement bleus au départ, s'étaient refermés pour faire place aux hémérocalles. Mon paradis, ce serait le fleuve dans sa pleine largeur et ses battures juste à la limite de notre forêt et pas très loin de mon jardin!